Parmi les nombreuses œuvres du patrimoine religieux de la commune de Cervières, il en est une, ancienne et très particulière, dont la restauration vient de s’achever.
Il s’agit d’un tableau de bois peint (2,07m x 1,02m), articulé en deux volets, et portant un décor sur l’une et l’autre face. Cet ensemble, par sa technique et son style, peut être daté de la fin du XVème ou du début du XVlème siècle.
La face principale, qui est aussi la mieux conservée, offre une représentation de saint Roch et de l’Assomption.
Saint Roch, figuré en pied, est dans la partie gauche. Il est reconnaissable à son manteau de pèlerin et à la blessure qu’il montre sur sa jambe, signe de la peste bubonique dont il a été guéri. Au registre inférieur est représenté saint Sébastien, invoqué comme saint Roch contre la peste et les maladies contagieuses ; en couronnement est peinte de manière très schématique une tour.
La Vierge est à droite, entourée d’anges. La scène choisie par le peintre illustre l’épisode au cours duquel saint Thomas aurait reçu de la Vierge la ceinture qu’elle laissa tomber pour le convaincre de la réalité de son Assomption. Au registre supérieur, Dieu le Père accueille Marie les bras ouverts, en bas saint Thomas recueille sa ceinture. Cette iconographie est presque exclusivement toscane. La dévotion qui s’y rattache était localisée à Prato, près de Florence, où l’on vénérait depuis le Xllème siècle la Sacra Cintola. Dans les Hautes-Alpes, la seule allusion iconographique à cet évènement est la représentation de saint Thomas tenant la ceinture de la Vierge et figurant parmi un groupe d’apôtres, sur le mur nord du chœur de l’église des Vigneaux. Ces peintures murales sont d’ailleurs contemporaines de ce panneau.
Au revers, apparaît le couronnement de la Vierge portant sur un bras l’Enfant Jésus. Cette partie est très dégradée et peu lisible, car le panneau a du être, pendant des décennies, exposé dos contre un mur humide.
L’ensemble de cette œuvre a été peinte à la détrempe, qui est une technique assez rare de peinture à l’eau utilisant pour liant la colle animale. Le peintre semble avoir recherché une esthétique particulière, exprimée par des formes stylisées et décoratives, et une harmonie colorée simple et contrastée.
Ce panneau provient probablement d’une ancienne chapelle Saint-Roch. Sa configuration en deux volets articulés peints sur les deux faces n’est pas encore expliquée, et le mystère de sa destination n’est pas élucidé. Il s’agit peut-être d’un fragment de triptyque ou, comme le suggère Anne-Cyrille Devillers, qui a réalisé la restauration, d’un panneau occultant de manière invisible une ouverture dans un ensemble de peintures murales.
Ce panneau est classé au titre des Monuments Historiques. (In fiche technique de la mairie).
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